Il touche 1 femme sur 2000 femmes en France, c’est quoi le syndrome de Turner ?

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Il touche 1 femme sur 2000 femmes en France, c’est quoi le syndrome de Turner ?

Introduction(1,2) 

Le syndrome de Turner doit son nom au docteur Henry Turner qui, en 1938, fut l’un des premiers médecins à identifier le syndrome et à lui consacrer des articles. Le mot “syndrome” signifie que cette affection se traduit par divers effets sur le corps. Le syndrome de Turner peut effectivement avoir tout un éventail de répercussions cliniques, mais il est très important de bien comprendre que chaque personne atteinte ne sera, en réalité, touchée que par une partie de ces répercussions cliniques.

Qu’est-ce que le syndrome de Turner ?(2,3) 

Le syndrome de Turner touche en moyenne un nouveau-né de sexe féminin sur 2 000. Il touche uniquement les filles.

Il peut se traduire par diverses répercussions cliniques, qui diffèrent d’un enfant à l’autre, et qui peuvent pour la plupart être traitées si les médecins estiment qu’un traitement est nécessaire. Certaines de ces répercussions cliniques sont plus courantes que d’autres. Par exemple, la plupart des petites filles touchées par le syndrome grandissent plus lentement que les autres et la plupart des femmes atteintes ne sont pas en mesure de procréer sans intervention médicale. A l’inverse, d’autres répercussions cliniques, telles que les anomalies cardiaques, ne se retrouvent que chez un nombre réduit de personnes atteintes du syndrome.

Quelles sont les causes du syndrome de Turner ?(2,9)

Le syndrome de Turner est lié à une modification du matériel génétique.

Le matériel génétique, qui nous vient de nos deux parents, est le support d’une “programmation” qui détermine notre apparence et la façon dont notre corps fonctionne. C’est, par exemple, notre matériel génétique qui fait que nos yeux sont bleus ou marrons et que nos cheveux sont blonds ou bruns. 

Habituellement le patrimoine génétique d’un enfant est constitué d’une part de la réplique exacte de la moitié du matériel génétique de son père et d’autre part de la réplique exacte de la moitié du matériel génétique de sa mère. Cependant, il arrive - très rarement - qu’une petite modification du matériel génétique se produise, avant ou juste après la fécondation. 
Lorsqu’une telle modification se produit, la copie du matériel génétique transmis par les parents n’est pas tout à fait conforme à l’original. Cette modification peut avoir des répercussions cliniques sur l’aspect physique de l’enfant et sur la façon dont son corps fonctionne.

Les modifications du matériel génétique dans le syndrome de Turner(2,4,5)

Notre matériel génétique se retrouve dans presque toutes les cellules de notre corps, sous la forme de chromosomes. Nous avons normalement 46 chromosomes, soit 23 paires de chromosomes. L’une de ces paires détermine notre sexe. Les chromosomes qui forment cette paire sont appelés les chromosomes sexuels.

Il existe deux types de chromosomes sexuels : le chromosome X et le chromosome Y. Les filles ont normalement ont normalement deux chromosomes X, tandis que les garçons ont un chromosome X et un chromosome Y. Les médecins utilisent les notations suivantes : 46,XX pour les filles et 46,XY pour les garçons.

Chez la plupart des filles atteintes du syndrome de Turner, l’un des deux chromosomes X est absent de l’ensemble des cellules du corps. On emploie alors la notation suivante : 45,X car la personne atteinte a au total 45 chromosomes, dont un seul chromosome X. On parle alors de syndrome de Turner classique.

Cependant, chez d’autres filles atteintes du syndrome, ce chromosome X n’est absent que dans certaines cellules du corps. On parle alors de mosaïque et on emploie les notations 46,XX/45,X pour souligner que la formule chromosomique diffère d’une cellule à l’autre.

On peut également se trouver face à des syndromes de Turner dans lesquels seule une partie du chromosome X est absente. On utilise alors les notations 46,X,Xp ou 46,X,Xq, selon la partie manquante du chromosome.

genetique

 

genetique

 

Comment savoir si une personne est atteinte du syndrome de Turner ?(1,2,3,6,7,8,10)

Certains symptômes du syndrome de Turner sont visibles dès le plus jeune âge. Les nouveau-nés atteints du syndrome peuvent par exemple avoir les pieds et les mains gonflés ou le cou d’aspect palmé. D’autres symptômes peuvent apparaître plus tard, par exemple lorsque les parents se rendent compte que leur enfant ne grandit pas aussi vite que les autres filles du même âge. Certains symptômes du syndrome ne deviennent visibles qu’à l’âge adulte : comme l'infertilité en l'absence de prise en charge spécialisée. Le syndrome de Turner n’ayant pas les mêmes répercussions d’un individu à l’autre, les médecins le détectent à des moments très divers selon les patientes. Il arrive que le syndrome de Turner soit détecté avant même la naissance du bébé, à l’occasion d’un examen prénatal.

retard

 

Les petites filles atteintes du syndrome sont d’une intelligence normale, mais peuvent avoir du mal à apprendre à faire certaines choses. Elles peuvent présenter plus de difficultés que leurs camarades à apprendre à faire de la bicyclette.

Par exemple, une petite fille atteinte du syndrome pourra apprendre facilement à lire mais avoir plus de difficultés avec la géométrie, ainsi qu’avec d’autres activités faisant appel à la compréhension des formes et à la maîtrise de l’espace. C’est ce qui explique que le fait d’apprendre à faire de la bicyclette ou à conduire une voiture demande aux petites filles et aux jeunes femmes atteintes du syndrome de Turner plus d’efforts et plus de temps qu’aux autres.

La présence d’un syndrome de Turner peut également être détectée à l’occasion de la découverte d’anomalies au niveau du coeur ou des vaisseaux sanguins. Une personne sur trois atteinte du syndrome de Turner est susceptible de présenter certaines de ces anomalies, dont la plus fréquente est le rétrécissement de l’aorte : l’artère qui constitue le tronc commun des vaisseaux sanguins qui transportent le sang du coeur vers les autres organes.
Le syndrome de Turner peut également conduire à une dilatation d’un vaisseau sanguin, avec formation d’une sorte de poche et peut également avoir des répercussions cliniques au niveau des valves qui régulent la circulation du sang dans le coeur.

Toutes les personnes atteintes du syndrome de Turner doivent aller consulter un cardiologue, médecin spécialiste du coeur, de manière à ce que le traitement adéquat soit mis en place, si nécessaire.

 

shema

SD : Déviation Standard
TS : Syndrome de Turner

Le médecin peut aussi soupçonner qu’une enfant est atteinte du syndrome de Turner lorsqu’il aperçoit chez la petite fille un grand angle de portage des bras. On parle alors de cubitus valgus.
L’attention du médecin et des parents peut également être attirée par la forme particulière des yeux et des paupières de l’enfant. La paupière supérieure peut être légèrement tombante (on parle alors de ptôsis) et il peut exister dans le coin interne de l’oeil un repli cutané (on parle alors d’épicanthus).

Les anomalies au niveau de l’oeil et des paupières que nous avons évoquées touchent environ 20% des personnes atteintes du syndrome.

Le syndrome de Turner peut également avoir une incidence sur la concentration dans le sang de certaines hormones, comme les hormones thyroïdiennes ou l’insuline. Les hormones sont des substances chimiques produites par des organes appelés « glandes » pour aller agir sur d’autres parties du corps. Une modification du niveau d’insuline présente dans le sang peut affecter la régulation du taux de sucre dans le sang. Une élévation du niveau d’hormones thyroïdiennes dans le sang peut se traduire par une accélération des battements du coeur, une augmentation de la transpiration, des tremblements, de l’anxiété, une augmentation de l’appétit, une perte de poids et des difficultés accrues à supporter la chaleur.
A l’inverse, la diminution du niveau des hormones thyroïdiennes dans le sang peut se traduire par un ralentissement du pouls, une prise de poids et une sensibilité accrue au froid.
Toutes ces modifications du niveau des hormones peuvent être prises en charge.
Le syndrome de Turner peut se traduire par certaines modifications de la forme ou de la position des reins. Une prise en charge thérapeutique n’est donc nécessaire que si ces modifications conduisent à une hypertension artérielle ou à des infections de la vessie ou des voies urinaires.

Une petite fille atteinte du syndrome de Turner peut être sujette à des otites à répétition. Les otites doivent toujours être traitées rapidement, de manière à éviter toute détérioration de l’audition (déficit auditif). 
On peut en outre limiter les répercussions cliniques de certains déficits auditifs au moyen d’un appareil auditif.
Le syndrome de Turner peut également avoir pour répercussion clinique un thorax plus large que la moyenne, avec des mamelons très écartés et/ou tournés vers l’intérieur au lieu de pointer vers l’extérieur. 
Le syndrome de Turner peut aussi avoir des répercussions cliniques au niveau de la bouche, comme des dents plus petites avec malocclusion et voûte du palais ogivale. 
 

Le syndrome de Turner peut, en outre, se manifester par un cou plus court et plus large que la normale. Dans 25% des cas, on peut observer la présence de plis de peaux s’étendant de la partie latérale du cou jusqu’à l’épaule. On parle alors de pterygium colli ou cou palmé.
En outre, l’implantation des cheveux est parfois plus basse que la normale. Les personnes atteintes du syndrome peuvent également avoir davantage de grains de beauté que les autres.
Il peut également arriver que la peau des personnes atteintes du syndrome perde sa couleur naturelle et blanchisse par endroits. On parle alors de vitiligo.

La détection prénatale du syndrome de Turner(2)

Lorsque le médecin diagnostique un syndrome de Turner avant la naissance de l’enfant, c’est généralement suite à des examens prénataux. La plupart des futures mamans subissent des échographies, un examen qui consiste à faire passer une sonde sur le ventre de la mère de manière à voir l’image du fœtus sur un écran.

Dans de rares cas, certaines femmes subissent également d'autres examens au cours de leur grossesse.
La femme enceinte peut également subir d'autres tests pendant sa grossesse. Il peut s'agir d’une échographie pour détecter des signes tels que l’hygroma kystique et à une petite taille (hypotrophie) du fœtus. Une malformation rénale (rein en fer à cheval), du cœur ou de l’aorte peuvent aussi conduire à une réalisation du caryotype fœtal.  

Des prises de sang effectuées sur la future maman au cours de la grossesse permettent également parfois de suspecter la présence d'une anomalie chromosomique potentielle qui devra être confirmée par des examens complémentaires.
Un prélèvement peut être effectué sur la membrane qui entoure le fœtus - on parle alors de prélèvement de villosité chorionique - ou en un prélèvement d’une partie du liquide dans lequel baigne le fœtus, ou liquide amniotique - on parle alors d’amniocentèse. 
Ces examens sont plus efficaces que l’échographie pour diagnostiquer un syndrome de Turner mais peuvent être risqués pour l'enfant mais aussi pour la mère.
 

La détection du syndrome de Turner chez le bébé(1,2)

Un syndrome de Turner peut être diagnostiqué chez une petite fille dès sa naissance, si elle a les mains et les pieds gonflés à cause d’une mauvaise circulation ou si le médecin remarque la présence de plis anormaux sur la peau de son cou. Le médecin peut également détecter certaines anomalies cardiaques peu après la naissance de l’enfant. De même, les ongles des orteils et parfois des doigts, peuvent être plats ou incurvés (au lieu d’être bombés).

Le médecin peut également diagnostiquer un syndrome de Turner lorsqu’il s’aperçoit que le bébé présente des difficultés à s’alimenter et à prendre du poids. En effet, les bébés atteints du syndrome ont beaucoup plus souvent que les autres enfants, tendance à avaler trop goulûment leur nourriture, puis à la vomir. De ce fait, ils ont du mal à prendre du poids. Ces problèmes disparaissent généralement avant le premier anniversaire de l’enfant. Cependant, dans la majorité des cas, tous ces signes sont absents et le diagnostic n’est posé que dans l’enfance, voire même plus tard.

La détection du syndrome de Turner chez l’enfant(2)

Bien que le syndrome de Turner puisse être détecté juste après la naissance de l’enfant ou même alors qu’il est encore dans le ventre de sa mère, il n’est souvent diagnostiqué qu’au bout de plusieurs années. En effet, la manifestation la plus évidente du syndrome est, dans 98% des cas, la petite taille de l’enfant par rapport aux enfants du même âge.

Les parents vont alors consulter un médecin au sujet de ce retard de croissance et c’est à ce moment-là que le médecin diagnostique un syndrome de Turner. 

Notons que la petite taille d’un enfant, si elle est l’élément qui permet le diagnostic du syndrome de Turner, n’est pas nécessairement liée à ce syndrome. Elle peut avoir des causes tout à fait diverses.

C’est pourquoi le médecin aura besoin d’effectuer certains examens avant de pouvoir diagnostiquer avec certitude un syndrome de Turner.

Par la suite, la croissance des petites filles atteintes est souvent suivie par un pédiatre, médecin spécialiste des enfants. Les pédiatres disposent de courbes de croissance leur permettant de comparer la croissance de chaque petite fille atteinte d’un syndrome de Turner avec celle des autres petites filles du même âge. Si une petite fille est beaucoup plus petite que la normale, son pédiatre pourra proposer aux parents d’entamer un traitement adéquat permettant d’accélérer sa croissance.

La détection du syndrome de Turner chez l’adolescente(1,3)

Entre 8 et 13 ans, le début de la puberté chez les filles. Elles commencent à avoir de la poitrine, leur croissance s’accélère et elles ont leurs premières règles. Toutes ces évolutions sont liées à la production par le corps d’hormones sexuelles féminines appelées les œstrogènes. Ces hormones, qui sont sécrétées par les ovaires, stimulent la poussée des seins et la croissance des os et déclenchent les règles.

Chez la plupart des jeunes filles atteintes du syndrome de Turner, les ovaires ne sont pas fonctionnels et sécrètent peu, voire pas du tout, d’œstrogènes. L' absence de développement de la puberté est due à une anomalie de fonctionnement des ovaires(dysgénésie overienne). Elle se manifeste en général par l'absence de développement des seins et de règles. 


Comme elles sont déjà généralement plus petites que les autres avant la puberté, l’écart se creuse de façon importante. C’est pourquoi il est important d'avoir une prise en charge adaptée afin de limiter les effets du syndrome. 

La détection du syndrome de Turner chez l’adulte(11)

À l’âge adulte, la femme atteinte du syndrome de Turner ne mesure pas plus de 1,45 m, elle a souvent une mauvaise vue (strabisme), une ouïe défectueuse, de nombreux grains de beauté, et un cou épais. Les traits de son visage sont également reconnaissables, toutes les femmes atteintes de cette anomalie ayant un air de ressemblance. En raison d’un dysfonctionnement de son système reproducteur, elles n’ont peu ou pas de poitrine, des règles irrégulières ou absentes, et souffrent d’infertilité.

Ce qu’il faut retenir

Le syndrome de Turner est une maladie génétique rare qui affecte exclusivement  les femmes. Il est causé par la perte d’un chromosome X normal ou par modification de sa structure. Les symptômes les plus courants incluent un retard du développement physique et sexuel, des ovaires peut ou non fonctionnels; les troubles cardio et métaboliques et une petite taille. Le syndrome de Turner touche en moyenne un nouveau-né de sexe féminin sur 2 000.(2)
 
En général, il est préférable de faire diagnostiquer le syndrome le plus tôt possible. Le diagnostic sera confirmé par un caryotype.

Il est important de noter que le diagnostic du syndrome de Turner doit être effectué par un professionnel de santé qualifié. Une fois le diagnostic confirmé, il est important de suivre des soins avec un suivi régulier par un médecin spécialiste pour surveiller les complications potentielles et pour recevoir des traitements symptomatiques pour améliorer l’état de santé ainsi que la qualité de vie. 

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  3. P. Saenger, K. Albertsson Wikland, and al. Recommendations for the Diagnosis and Management of Turner Syndrome.The Journal of Clinical Endocrinology & Metabolism 2001 : 86, n°7.
  4. Mathuriya Gayatri dave Anupama. the journal of obstetrics and oncology of india. November – December 2014. 
  5. William E. Winter. Laboratory evaluation of short stature in children. 2021.
  6. Vidal. Hypothyroïdie. 2021.Disponible sur le site du VIDAL. Consulté le 22/03/2023
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